L'homme est un grand faisan sur terre
L'homme est un grand faisan sur terre, Herta Müller, Ed. Maren Sell, 1988
Windisch est meunier dans un village de Roumanie. La Roumanie des Ceaucescu. Il fait partie de la communauté souabe de ce pays, une minorité allemande. Son souhait le plus cher est d'émigrer vers l'Allemagne et d'y emmener sa femme et sa fille. Seulement, obtenir des papiers à cette époque, dans ce pays, n'est pas simple. Entre corruption, pots-de-vins et droit de cuissage, les policiers font ce qu'ils veulent.
L'ambiance n'est donc pas joyeuse. Windisch parcourt et regarde son village et ses habitants avec un oeil nouveau, celui du futur migrant : ce qu'il voit ne le remplit pas de joie. Nous non plus d'ailleurs. C'est triste, morne, plombant.
Je voulais découvrir l'écriture de Herta Müller, Prix Nobel de Littérature en 2009, et j'ai trouvé que ce petit roman était une bonne entrée en matière. Je suis surpris par cette découverte. Herta Müller écrit des phrases très courtes, souvent sujet + verbe + complément. Elle décrit des personnes, des lieux et des actions on ne peut plus basiques et prosaïques. On sent l'auteure très détachée de ce qu'elle écrit. C'est un vrai paradoxe, puisqu'elle est elle-même une Souabe de Roumanie émigrée en Allemagne, sous Ceaucescu. Dans le même temps, malgré son récit très terre-à-terre et ses phrases sèches, je n'ai pu m'empêcher de trouver une certaine poésie à l'histoire, à la manière de la raconter.
En fait, je suis en pleine confusion : certaines phrases me sont complètement hermétiques, d'autres permettent de suivre l'histoire. Je me suis demandé plusieurs fois pourquoi telle phrase était à telle place, ce qu'elle signifiait et ce qu'elle apportait au récit. Jamais je n'ai pu répondre à mes questionnements. Je ne suis jamais vraiment entré dans le sujet, j'ai toujours eu la sensation d'être au-dessus du livre, de ne pouvoir être dedans. Néanmoins, j'avais très envie de terminer ce livre. Une sorte d'attirance pour l'écriture, pour les situations et les personnages. Inexplicable.
C'est donc à la fois dubitatif et certain d'avoir fait une lecture pas commune que j'écris ce billet en demi-teinte, mi-chèvre, mi-chou, oscillant entre emballement et déception.