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Nous autres

Publié le par Yv

Nous autres, Stéphane Audeguy, Gallimard, 2009
Pierre arrive au Kenya à la mort de son père qu'il n'a quasiment pas connu et qui s'est installé dans ce pays depuis une trentaine d'années. Il découvre la vie que son père y a menée et les habitants de ce pays, berceau de l'humanité. En parallèle, des narrateurs s'exprimant en utilisant le "nous" racontent l'histoire du Kenya, insistant sur la longue colonisation par l'Angleterre et sa volonté d'y laisser sa trace indélébile en construisant une ligne de chemin de fer gigantesque, et sur la décolonisation. Ces narrateurs sont tous les morts (80 milliards) que la Terre a portés. D'autres personnages, bien vivants, eux, apparaissent dans le livre. Tous se rencontreront.
Oserais-je avouer que j'avais peur en ouvrant ce livre : peur parce que je n'avais pas aimé La théorie des nuages du même S. Audeguy, peur parce que le sujet ne me tentait pas et que je sentais un certain élitisme de mauvais aloi ? Que nenni ! Je suis entré dans ce livre pour ne plus en sortir (sauf à la fin, bien sûr !). Quel style ! Le chapitre 0 est à mon sens le plus beau dans l'écriture alors qu'il raconte ce que Pierre vit de pire dans ce pays : un safari. Il émane des ces lignes une poésie qui incite à continuer sa lecture. La suite, si elle est moins poétique, témoigne de la beauté de l'écriture de Stéphane Audeguy. De belles phrases, souvent longues. Pas toujours de verbes. L'histoire n'est pas en reste et pour qui n'aime pas particulièrement le Kenya, rien de rebutant, bien au contraire : on apprend énormément de choses sur ce pays sans avoir la sensation d'assister à un cours d'histoire. L'idée d'utiliser les voix des morts de la Terre est lumineuse et prolonge la poésie du livre.
Le rythme est lent volontairement, s'adapte au climat du pays et nous permet d'y voyager en douceur. Rien à voir avec la soi-disante indolence africaine, concept qui n'a court que dans l'hémisphère nord, parce si nous, nous parcourons le Kenya au rythme des longues phrases de l'auteur, les Kényans eux vivent vite, conduisent vite sur leurs routes cabossées et courent vite, notamment Anyango, championne de marathon, comme d'autres des ses compatriotes. Quant à cet élitisme évoqué plus haut, j'admets que ce livre n'est sûrement pas le plus facile que j'aie lu, mais il est largement lisible par le plus grand nombre.

Interlignes a questionné l'auteur pour un autre roman

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