Phénix
Phénix, Raymond Penblanc, Christophe Lucquin, 2015...,
Le narrateur est un tout jeune garçon d'une douzaine d'années, il dit se nommer Perceval. Il vit avec sa mère et son grand frère Roland, 16 ans. Tous deux ont le même père, disparu. Autant Roland est déluré, quasi-délinquant, dragueur, amateur de filles et de femmes, de cigarettes, de sorties, autant Perceval est prêt à faire sa communion solennelle, totalement croyant en cette vieille religion rancie et culpabilisante, notamment pour l'éveil au corps, à l'amour et à la sensualité. Ce jeune homme solitaire, particulièrement sensible découvre la vie d'adulte, la malveillance voire la méchanceté, mais aussi l'amitié. Il aime aussi se réfugier dans son repaire, un arbre mort.
Le garçon-narrateur a douze ans et est relativement innocent. Il découvre au fur et à mesure de l'ouvrage la méchanceté des autres, parce qu'il est plus petit, parce qu'il fait partie de la chorale de l'école et qu'il chante bien avec une voix d'ange ; tout cela changera avec la puberté, mais en attendant ce jeune homme est encore "pur", donc gênant pour les autres qui ne peuvent supporter de l'avoir face à eux. Très vite il découvre ce que la vie lui réserve, Roland son frère se charge de le lui montrer : "Roland, c'est donc Roland, le preux chevalier, mais, à l'entendre, son olifant est dans son froc. Sauf que ça n'est pas lui qui souffle dedans, ce sont les filles.[...] Moi je suis Perceval, Perceval l'Ahuri, qui trempe encore ses doigts dans le bénitier et bave sa foi sur ses cahiers." (p.9/10)
Perceval n'est pas comme tous les autres garçons, plus sensible, solitaire, différent. C'est cela qui met mal à l'aise certains qui le harcèlent et le menacent. Encore une fois, la différence fait peur et plutôt que de tenter d'apprendre d'autrui, de le connaître et de savoir ce qu'il peut apporter, certains préfèrent lui faire du mal, par peur de se confronter à ce qu'ils ne comprennent pas.
Roman construit en quatre chapitre du nom des saisons, commençant par l'automne. A chaque saison Perceval change, évolue, découvre, apprend. Une belle écriture qui part parfois dans des régions inconnues -de moi, mon côté terre-à-terre- mais qui toujours nous reprend pour nous emmener un peu plus loin. Beaucoup de sensibilité, d'émotions mais aussi des moments plus légers, plus drôles, c'est l'enfance quoi. Des phrases et un vocabulaire simples, certaines à retenir : "Il faudrait loger une femme dans chaque homme pour l'empêcher de faire couler le sang." (p.144/145)
Un très beau roman sur l'enfance, sur la différence, sur le passage à l'âge adulte et l'abandon des rêves et des illusions (pas pour tous, heureusement).