Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Mon père, c'était toi ?

Publié le par Yv

Mon père, c'était toi ?, Vincent Pichon-Varin, Le Cherche midi, 2012

Gilles, vendeur de chaussures le jour et transformiste dans un cabaret de Montmartre le soir reçoit un jour une lettre d'un notaire normand assez mystérieuse. En fait, Gilles hérite d'une propriété en Normandie, somptueuse maison avec terres, de son père jusqu'ici inconnu de lui. Il est né d'une brève liaison entre sa mère et son complice d'alors au cabaret (et oui, le cabaret est dans leurs gènes), Fred Ginger. Accompagné de son épouse, des colocataires de sa mère, tous les six entre 65 et 89 ans, il décide d'aller voir cette maison et d'en apprendre plus sur son père.

Un livre-comédie dans l'air du temps : les personnages secondaires mais très fortement présents sont une bande de personnes âgées, toutes colocataires à Paris, dotées d'une énergie et d'une volonté de bouger et faire bouger les autres assez peu communes. Ils dynamisent le récit nettement. C'est un livre léger, amusant, souriant, primesautier. La première partie est vraiment agréable et très légère, puis l'histoire se tend un peu -juste un peu, le sourire et la sensation de bien-être perdurent- lorsque Gilles émet des doutes quant à la paternité de l'homme dont il hérite. Un petit suspense se fait alors jour, qui aura son explication en toutes dernières pages.

On est dans une période idyllique, "tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil" (Jean Yanne) : Paris est un rêve, la campagne un havre de bonheur, un rien kitsch, "comme au bon vieux temps". C'est coquet, joyeux, désuet. Vincent Pichon-Varin plonge la tête la première dans tous les clichés sur les Provinciaux (il met un accent au paysan normand "à y accrocher son pardessus" comme disait Coluche)

"- Vous allez me goûter çô, il faut goûter, c'est moi qui l'ai fait et ce pommeau il est impeccab'. Un an de fût de chêne, c'est pô pour de rien, c'est sûr çô y fait au goût. Allez, à la bonne vot' et bienvenue dans not' campagne. Elle est-y pas belle not' verdure . Gadez-moi çô ! Jolie, hein ?" (p.145)

Le cafetier n'est pas mal non plus dans son genre qui s'exprime à la troisième personne "Qu'est-ce qu'il boit ?" (p.33) (ce que personnellement, je jugeais être l'apanage des garçons de cafés parisiens, comme quoi, chacun ses stéréotypes). La confrontation entre les Parisiens, artistes et les habitants du petit village donne lieu à des quiproquos, des blagues un peu éculées, au mieux prévisibles, mais qui étonnamment passent plutôt bien.

L'auteur est parfois dans la caricature, comme ce portrait d'un journaliste local :

"Le rédacteur en chef de L'Eveil est un vrai Normand, jovial et bon vivant. Ses grosses moustaches en bataille peinent à masquer de bonnes joues rougeaudes, gonflées aux escalopes à la crème, au cidre et au camembert au lait cru. Il promène sur sa silhouette épaisse toute la définition du mot "bonhomie"." (p.211)

Si l'histoire s'était déroulée en Corse, il eut été "élevé au fromage de chèvre et à la cochonnaille, un visage en lame de couteau, dur avec des yeux qui, néanmoins inspirent la confiance et l'honnêteté", et en Bretagne : "Un vrai Breton, le teint rougeaud par l'abondance de sa consommation de cidre et en même temps buriné par les embruns, comme si les galettes de blé noir ingurgitées en nombre se reflétaient sur son visage à la fois expressif et fermé". Je vous passe le Berrichon, le Vendéen et le Ch'ti !

Voilà donc pour ce livre qui regorge de clichés, d'évidences et de facilités, mais qui dans le même temps vous fait passer un moment de lecture agréable, sans aucune arrière pensée : un livre qui ne prend pas le chou (normal, il ne se passe pas en Auvergne !) L'auteur sait faire passer les faiblesses de son bouquin au second plan : on les oublie (ou on les range dans un coin) au profit de l'histoire, et de la joyeuse aventure.

C'est bon comme une journée ensoleillée à la campagne entre amis, un pique-nique légèrement arrosé d'un rosé frais, une nappe à carreaux, des gens beaux qui jouent et rient et ne se prennent pas au sérieux. Bon comme un pub pour un fromage ou tout autre produit qui veut vanter ses mérites paysans, "de terroir".

Lu -et finalement approuvé- un après-midi d'un temps on ne peut plus pourri  : idéal pour rester quand même de bonne humeur !

Merci Pauline de chez Gilles Paris.

Commenter cet article
I
Mais c'est bigrement tentant cette petite chose !!!
Répondre
Y
<br /> <br /> pour passer un chouette moment sans se prendre le chou<br /> <br /> <br /> <br />
L
passer un bon moment malgré les clichés, c'est toujours bon à prendre!
Répondre
Y
<br /> <br /> Tu as raison, quand il fait moche dehors, de quoi se remonter le moral c'est bon à prendre.<br /> <br /> <br /> <br />
Z
c'est à craindre !!!
Répondre
Y
<br /> <br /> Je ferai mieux la prochaine fois, promis<br /> <br /> <br /> <br />
Z
Que faites-vous des caricatures auvergnates ????<br /> Je note ce livre dans ma LAL. il est important d'avoir ce genre de livres légers, bons, voire goûteux
Répondre
Y
<br /> <br /> Je suis désolé, je ne voulais froisser personne, j'aurais dû citer toutes les régions françaises !<br /> <br /> <br /> <br />
A
Quand je dis que les vieux deviennent tendance !! je ne sais pas si je pourrais supporter les caricatures de normands (j'en suis) rien que l'extrait me donne des boutons.
Répondre
Y
<br /> <br /> D'accord avec toi, j'ai eu du mal à supporter aussi. J'avais déjà eu la même sensation dans un roman à propos des Bretons, je crois que c'est dans un livre d'Amada Sthers !<br /> <br /> <br /> <br />
C
Une lecture sans prise de tête? Idéale de temps en temps !
Répondre
Y
<br /> <br /> Là, aucun risque de migraine. Vas-y tranquille.<br /> <br /> <br /> <br />