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Les chagrins de l'Arsenal

Publié le par Yv

Les chagrins de l'Arsenal, Patrice Delbourg, Le cherche midi, 2012

"Un livre saccagé vogue au fil de la Seine. Un autre, déchiqueté en petits morceaux, gît au fond d'un corbeille de jardin public. Un troisième, calciné, attend sur un banc à l'arrêt d'un autobus. Une inquiétante et cruelle épidémie contamine le quartier de l'Arsenal. On murmure qu'un forcené s'adonne, nuitamment, à un étrange ballet de livricide. Un petit Farenheit de poche. Un autodafé intime. Faire disparaître d'une bibliothèque tous les ouvrages qui ont pourri vos jeunes années... Froide détermination ? Insupportable solitude ? Folie douce ? Timothée Flandrin a une conception toute personnelle de la loi du talion." (4ème de couverture)

Le moins que je puisse dire c'est que Patrice Delbourg n'a pas une écriture commune et courante. Son texte d'un style littéraire haut de gamme, franchement élitiste est magnifique. Quel dommage qu'il soit constamment émaillé de mots de moi totalement inconnus. Environ un par page ! Conseil avisé : lire avec un dictionnaire à portée de main, mais attention, préférer le Littré au Petit Robert, car dans ce dernier, certains mots ne sont pas répertoriés. Une lecture, qui malgré des tournures de phrases travaillées, très belles et vraiment plaisantes en devient "canulante" (p.11) à force d'usage de mots savants, peu usités, voire plus du tout, sauf par l'auteur lui-même.

C'est coincé entre les murs de la maison -je ne suis pas sûr de pouvoir ici user du mot "bajoyers" (p.12) qui s'applique plutôt aux écluses et aux ponts- pour cause de mauvais temps (étonnant cet été, n'est-il pas ?) que je me lance dans la lecture de ce roman. Mais quelle mouche m'a donc piqué ? J'aurais dû, avant de débuter, faire "propédeutique" (p.10) en lettres. Il y est question de voile qui "faseyait au vent" (p.9) (pléonasme ?), de "biffons" (?) (p.14), de "portulan" (p.18), de "poliorcétique" (p.23) ou encore d'"elzévir" et de "garamond" (p.37).

Rassurez-vous, je ne vous ferai point un "épitomé" (p.33) ou un "spicilège" (p.19) de ce livre, parce que d'une part, j'ai arrêté de noter les mots auxquels je n'entrave que dalle à la page 50, et parce que d'autre part, mon "dictame" (p.48) personnel fut de stopper ma lecture avant la fin. Je n'en suis pas au point de préférer un "antiphonaire" (p.38) -surtout lorsqu'on connaît mon anticléricalisme-, mais j'avoue avoir pensé à "l'estrapade" (p.49) -en fait, je déconne, je ne connaissais ni le mot ni le principe.

Loin d'être un "pouacre" (p.39) vivant dans une "sentine" (p.50), je me suis pourtant senti puant de manque d'instruction, de savoir, un vrai blaireau, quoi ! Un putois ! Ragaillardi par le fait que je ne trouve pas toutes les définitions des mots dans le dictionnaire, et ayant troqué la grimace pour un rictus ironique aux coins des "badigoinces" (p.44), je me suis dit :

"Mon petit gars (et oui, quand je me parle, je m'appelle "mon petit gars", parce que si je dis "ma petite fille", ça m'excite et après je ne sais plus ce que je devais écrire ; ça, c'est du pompage -si je puis m'exprimer ainsi- du regretté Pierre Desproges), tu vas noter tous les mots que tu ne piges pas et tu vas faire ton billet en les incluant dedans. Pas chouette comme défi ça ?"

C'est donc tout gonflé de fierté, par ma relative réussite, (je dis "relative", car je ne suis pas certain de ne pas avoir détourné quelques sens malgré moi) mon "vertugadin" (p.22) des chevilles, que j'achève cet article & -"esperluette" (p.33)- que je peux enfin citer l'auteur : "Excédé jusqu'à défaillir par un funeste souvenir d'ânonnement scolaire au tableau noir, il pourfendait ainsi d'un coup de Laguiole une arborescence d'Arsène Houssaye, un surgeon d'Henry Bordeaux, déjà bien encombré d'un salmigondis d’afféteries" (p.31)

Alors, pour ne point être trop mauvais, voire jaloux, mauvaise langue et totalement inculte, je préfère reprendre le compliment sus-cité et le renvoyer à l'expéditeur: "Monsieur Delbourg, vous voici pris en flagrant délit d’afféterie !"

Roman de cette rentrée 2012, merci Solène.

 

challenge 1%

Commenter cet article
C
C'est tout le problème de la langue française, y a plein d'mots. Même les dicos, des fois, il les connaissent pas tous. Patrice Delbourg lui, oui, il les connait tous. J'suis sûr qu'il te traduit<br /> "valétudinaire", "matutinal" ou "taud" en une demie seconde.<br /> Dire que beaucoup de nos compatriotes se contentent de moins de cent mots pour s'exprimer, quel gâchis.<br /> Amitiés, Yv...
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Y
<br /> <br /> Un gâchis, certes, mais P. Delbourg abuse un tantinet et plaçant des mots qui empêchent la compréhension générale du texte si on n'en connaît pas le sens à toutes les pages, voire plusieurs par<br /> page. Lui les connaît sûrement, mais pas moi et ça m'agace... Et pourtant, ma modestie dût-elle en souffrir je me flatte d'avoir un peu plus de 300 mots de vocabulaire<br /> <br /> <br /> A bientôt<br /> <br /> <br /> <br />
Z
Ton ironie me fait pencher du côté de ce livre, histoire de...
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Y
<br /> <br /> Moi ironique, comment ça ?<br /> <br /> <br /> <br />
A
Mon Dieu, Molière is alive ! Et il revient....
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Y
<br /> <br /> Exact, Molière II, le retour, et il est pas content !<br /> <br /> <br /> <br />
K
Mais c'est qu'au départ l'idée tait bonne, cette histoire de livricide!<br /> Bon, les mots inconnus, il y en a de deux sortes (comme pour une lecture en VO): ceux dont on peut deviner le sens par le contexte, et on continue sa lecture, ceux dont on ne pige que couic (si tu<br /> me permets) et revenant trop souvent pour que la lecture soit agréable. Il faut un équilibre, j'ai bien compris. Mais tu fus un capitains courageux, tout de même!
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Y
<br /> <br /> Je l'ai pris sur l'idée de départ, et puis les mots furent mes vainqueurs, et encore, comme tu le dis bien, là je ne parle que ceux qui empêchent de comprendre la phrase ; ceux dont on devine le<br /> sens et qui ne gênent pas l'avancée, je n'en parle pas.<br /> <br /> <br /> <br />
C
tu m'en veux si je le note pas ? Pourtant avec "arsenal "dans le titre, je m'attendais à autre chose...
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Y
<br /> <br /> Tu es pardonnée...<br /> <br /> <br /> <br />
R
salut yves<br /> <br /> hé..hé le compliment peut t ' etre retourné!!!<br /> plus précis que moi sur les pages ou l' on peut débusquer son fameux vocabulaire ou l'auteur martelle à l ' envi<br /> son style mais aussi sa culture(certains pourront rechigner son parti pris)enfin malgré tout plus digeste qu' un dictionnaire...dommage sans doute d'avoir<br /> l ' impression... de lire une successions de critiques, si brillantes soient-elles ! qui nous laisse un style entier aux contours ébouriffés par cette afféterie DELBOURGEOISE !<br /> <br /> amicalement<br /> raphael
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Y
<br /> <br /> D'accord avec toi, c'est un peu un étalage de culture et de critiques qu'il pourrait sans doute s'appliquer à lui-même !<br /> <br /> <br /> Merci du passage<br /> <br /> <br /> <br />