Les brumes du passé
Les brumes du passé, Leonardo Padura, Ed. Métailié noir, 2006
Cuba, été 2003, Mario Conde, dit le Conde, vit en achetant et vendant des livres anciens. Ancien policier -il a démissionné une douzaine d'années plus tôt-, il traque les bonnes affaires des Cubains obligés de vendre leurs livres pour pouvoir manger. C'est en visitant une bibliothèque extraordinaire qu'il va découvrir, des livres précieux, certes, mais aussi une mystérieuse voix de femme qui va littéralement l'envoûter et qui l'amènera à découvrir les bas-fonds de La Havane.
Ce roman commence comme une histoire tranquille et l'on se demande même pourquoi il est qualifié de "noir". Et puis, doucement, l'histoire et les personnages basculent dans le sombre et le policier. Leonardo Padura écrit dans une langue très colorée, haute en couleur. Il utilise beaucoup d'images dans de longues phrases donnant un ton très personnel et très agréable à son style et la sensation de lire un vrai auteur cultivé et documenté. Elles suivent ou impriment la lenteur et la distance nécessaires au Conde pour entrer dans l'histoire et raisonner correctement. Les dialogues ne sont pas en reste et les personnages, aussi bien le Conde, que ses acolytes moins exposés, sont bien décrits et assez forts pour tenir tout au long de cette histoire pleine de rebondissements et de découvertes. L'auteur oscille habilement entre le roman noir et un livre plus "mélancolique sur la perte des illusions, l'amour des livres, de la culture ..." (4ème de couverture). Il n'est pas exempt non plus du constat de la déchéance de La Havane et de Cuba et de la désillusion des habitants obligés à moult bassesses pour simplement manger et la résignation des gens aimant la culture qui constatent la quasi disparition de celle-ci de cette île qui fut pourtant un terreau fertile pour la musique et l'écriture. En cela, on peut rapprocher Padura des Mankell et autres écrivains de polars ou romans noirs ne se contentant pas de raconter une bonne histoire, mais y ajoutant une réflexion sociétale ou politique ; de quoi lire avec plaisir en s'instruisant !
Je ne connaissais pas Leonardo Padura, ni son personnage Mario Conde, et étais très peu au fait de la vie à Cuba : je lui sais gré de m'avoir un peu ouvert les yeux sur son île natale et j'avoue avoir très envie de retrouver le Conde dans d'autres aventures : je me suis laissé dire d'ailleurs que L. Padura avait écrit d'autres livres avant celui-ci avec comme héros l'inspecteur Mario Conde, du temps où il était encore policier.