Moon
Moon, Cyrille Pomès, Rue de Sèvres (couleurs Isabelle Merlet)
En saison, cette petite ville du bord de la Méditerrannée attire beaucoup de touristes. Hors saison, la vie y est calme, très calme, trop calme pour les ados qui y vivent. Accros aux réseaux sociaux, ils trompent l'ennui et comblent les vides entre les cours et parfois pendant, en s'envoyant des messages sur tous les réseaux imaginés. Cela crée des tensions sur le nombre de like, sur ceux qui sont amis virtuels ou pas, tout en se côtoyant en réel. Que dire de celui qui n'a pas de portable, quasi seul ?
Mais un jour l'antenne relais grille sous la foudre et tout se tait : plus de réseaux, ni d'Internet et même pas de télé.
Très bien cette bande dessinée qui, je trouve, dépeint justement et finement les ados, leurs relations, leur rejet du monde adulte, les tensions qu'ils ont entre eux, les amours naissantes, le besoin de reconnaissance, d'appartenance au groupe. Cyrille Pomès fait ça sans être lourd. Il suggère plus qu'il ne montre et pourtant tout est très clair : le harcèlement physique ou moral, la violence parentale, le machisme... Il travaille surtout sur le lien social : doit-il passer nécessairement par un téléphone comme semble le laisser paraître nos usages et particulièrement celui des adolescents ? Les relations se coupent elles dès lors qu'on se retrouve en face à face, ce qui, juste après l'arrêt de l'antenne est une vraie question ?
J'aime bien le dessin de Cyrille Pomès, vif, clair et expressif. Beaucoup de petites cases pour les personnages, mais aussi des plus grandes jusqu'aux doubles pages pour des paysages ou des vues en grand angle. Les couleurs sont chaudes, station balnéaire oblige. Le tout donne un très bel album, qui, encore, une fois chez Rue de Sèvres, parle à plusieurs générations, en abordant des sujets graves et sérieux, des sujets d'actualité mais sans être ni moralisateur ni austère ni angoissant.