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Publié le par Yv

, Hubert Haddad, Zulma, 2015.... 

Shōichi est, quinze ans après sa rencontre avec Saori, toujours amoureux d'elle. Plus âgée que lui, elle est décédée accidentellement au début de leur relation, mais elle a laissé en lui une empreinte indélébile. Elle écrivait un mémoire sur Santōka Taneda (1882/1940), dernier grand haïkiste. A la mort de Saori, Shōichi qui a récupéré ce travail, le lit et dès lors, met littéralement ses pas dans les siens : "La marche à pied mène au paradis ; il n'y a pas d'autre moyen d'y parvenir, mais il faut marcher longtemps." Ainsi débute ce roman.

Il est des auteurs produisent un livre par saison, de préférence en septembre au moment où ils ont le plus de chance d'être médiatisés, et même si on ne les a jamais lus -si si cela se peut, j'en suis une preuve vivante- on les connaît quand même, voire on sait même ce qu'ils écrivent. C'est un peu comme les émissions de télé -réalité ou autre-que l'on ne regarde pas mais dont on sait le principe et dont on connaît les intervenants parce que tout le monde en parle partout. C'est lassant. Dès lors pourquoi s'infliger des lectures attendues et parfois mauvaises lorsqu'on sait qu'en grattant un peu, on peut trouver des auteurs moins connus du grand public comme on dit désormais, moins "vus à la télé" et qui écrivent formidablement ? Et une fois trouvé un nom, par exemple celui de Hubert Haddad, pourquoi se contenter d'un seul roman puisque pour cette rentrée littéraire, il en a écrit deux ? Et comble du bon goût, cet écrivain à le talent d'écrire deux romans totalement différents -alors que certains avec leur livre par an écrivent toujours le même. Après l'excellentissime Corps désirable que je vous recommande très vivement, voici donc . Ce roman se déroule au Japon, au XXIème siècle avec Schōichi, le jeune homme amoureux et à la fin du XIXème et au début du XXème avec Taneda Santōka, le haïkiste. Plus Schōichi avance dans la lecture du mémoire dédié au poète, plus il suit ses pas d'ermite, de marcheur. Santōka est un personnage réel, un jeune homme qui a vu sa mère se jeter dans le puits pour ne plus subir l'inconstance et l'infidélité de son époux. Après un mariage piteux, et divers boulots auxquels il n'est pas assidu, il partira sur les routes.

Comme toujours, l'écriture de Hubert Haddad est belle, assez différente de celle de Corps désirable, plus elliptique, poétique, phrases plus courtes. Dans certains passages, mon esprit s'égarait, et là m'est revenue une phrase lue dans le livre de Jean-Michel Ribes sur l'écriture, qui ne concerne pas tout le roman mais juste ces quelques paragraphes : "Écrire un grand livre composé de mots auxquels je ne comprendrais rien mais dont la sonorité m'entraînerait vers des pensées jusque-là inconnues..."

est lent, descriptif, contemplatif, le temps s'étire sans que le lecteur le trouve long. C'est beau, c'est zen, les excès de saké de Santōka donnent l'envie de boire un thé japonais plutôt que de l'alcool. On est dans l'ambiance du Japon fin XIXème/début XXème siècle rapidement : "La famille de Sato Sakino, plutôt démunie mais de bonne éducation, agréa l'offre de ce riche voisin, et comme leur fille était consentante, le mariage devant les invités eut lieu aux premières feuilles rouges de l'automne 1909, peu avant l'assassinat du prince Itō Hirobumi par un patriote coréen." (p.129) Et comme souvent, en plus de la description, H. Haddad place au détour d'une phrase une information qui fait qu'en plus du plaisir on apprend un truc. Pour finir, je ne résiste pas au plaisir de citer la fin du rabat de 1ère de couverture décrivant l'écriture de l'auteur : à la fois j'acquiesce à ces propos et dans le même temps, je vous renvoie à la phrase de JM Ribes sus-citée :

"Son écriture est comme la palpitation miraculeuse de la vie, au milieu des montagnes et des forêts, à travers le chant des saisons, comme un chemin sur le chemin."

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E
Ce n'est pas le genre que je lis ou qui m'attire mais il faudra peut-être que j'essaie.
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Y
Et pourtant, de dans tout est bon...
N
D'habitude je m'ennuie quand ça s'étire et que ça se traine, mais là, j'ai envie de tenter le coup...!
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Y
je suis un peu comme toi, je m'ennuie assez vite, mais là, le charme de l'écriture est plus fort que l'ennui
K
Je pense le lire et m'en réjouis d'avance ! (même si cela doit attendre un peu !)
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Y
Le plaisir n'en sera que meilleur
Z
Comme je suis d'accord avec toi. Je note ce second livre d'Haddad. Je le trouverai certainement à la bibli un jour ou l'autre.
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Y
S'ils ont du goût littéraire, sûrement
H
J'ai essayé une fois de lire cet auteur, j'ai abandonné ! par contre je vais lire Ribes ;-)
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Y
Je n'ai pas réussi à lire tous ses livres moi non plus. As-tu essayé Palestine ? Il devrait te plaire
A
Une vraie pépite loin des sentiers battus, ça change.
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Y
Oui et ça fait du bien
K
Jamais lu (et c'est le troisième avis sur Ma ce matin, avis fort différents- et c'est bien)
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Y
Je n'ai pas encore pris le temps de lire les autres avis, mais je vais aller les voir
A
"corps désirable" ne m'attire pas beaucoup, par contre celui-ci oui. Je n'avais pas repéré qu'il en sortait deux.
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Y
J'ai préféré Corps désirable, mais Mà est très bien aussi dans un genre différent, plus proche a priori de Peintre d'éventail du même auteur assez connu mais que je n'ai pas lu
J
Je vais le lire bientôt. Sortir deux livres pour une rentrée, c'est assez rare. L'écriture est toujours aussi belle apparemment.
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Y
Oui, c'est rare surtout lorsqu'ils sont aussi différents, et je confirme la belle écriture de Hubert Haddad est là et bien là