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Atelier d'écriture

Publié le par Yv

Hier, chez Gwenaelle, dans son atelier d'écriture, il était question de Patrick Modiano. De faire de la poésie avec les titres de ses bouquins (en gras et italique, comme ça vous pouvez pas les rater, dans le texte). Bon, moi la poésie, c'est pas trop mon truc, alors... 

 

Lycée Patrick Modiano

 

Lycéen, je ne vais pas beaucoup aux cours. Le lycée Patrick Modiano de Caen, rue des boutiques obscures ne connaît pas vraiment mon visage. Non, moi, je me fais des tunes, je deale. Mais attention que de la bonne. Je vends l’herbe que je fais pousser, et je l’ai même baptisée : L’herbe des nuits, parce qu’après l’avoir fumée, on se sent bien, comme après une bonne nuit de sommeil.

Ce soir, je m’suis fait gauler. Les flics de la ronde de nuit, m’ont piqué tout mon stock. Ils ne m’ont pas embarqué au poste, non, ils m’ont emmené dans un rade d’un pote à eux, celui qu’ils fréquentaient avant de devenir ripous, dans le café de la jeunesse perdue. La leur, moi j’ai encore de beaux jours. J’ai réussi à me tirer, mais j’ai plus rien à vendre. Un manque à gagner.  Heureusement, j’ai une réserve dans un endroit connu de moi seul. Un vieux gymnase désaffecté, qu’on fréquentait gamins, avec les potes, Le vestiaire de l’enfance quoi ! J’y vais, décidé, j’y cours même. Je croise personne, juste un clebs qui me course, le chien de Printemps. Printemps, c’est le nom du mec qui tient le café près du vieux gymnase. On sait pas son nom, mais son café, il s’appelle Le café du printemps. Alors tout le monde l’appelle Printemps. Bon j’arrive à le semer, c’est pas très dur, parce qu’il est vieux le chien de Printemps : en fait, nous pour se marrer, on l’a surnommé Hiver, parce qu’il est tout blanc, qu’il tousse et qu’il tremble tout le temps, c’est pour ça qu’il est pas dur à semer.

Bon, j’arrive au gymnase et là, j’entends du bruit, ça gueule, ça hurle. Une voix de fille et des voix de mecs. Je speede et je tombe sur des gars que je connais, des mecs à pas fréquenter. Ma mère elle dit de mes potes que ce sont de si braves garçons. Mais ceux-là, ils sont pas braves du tout , ils sont tout sauf cool. Et avec eux, qui crie, je vois la petite Bijou. Madeleine Bijou. La Bijou. En voilà une fille qui porte bien son nom. Elle est au lycée. Elle passe tous les jours devant moi, ne s’arrête jamais. Elle consomme pas. Mais, moi, pour elle, j’arrêterais mes conneries. Je dealerais plus. Il suffirait qu’elle me parle et je retournerais –ou plutôt je débuterais-  en cours. Elle est en mauvaise posture. Pas encore à poil, parce que je suis arrivé à temps, mais c’est bien parti pour. Ils sont trois dessus à essayer de la déloquer, et je pense pas que c’est pour lui faire du bien après. Enfin, eux, ils pensent que si, mais je crois qu’elle est d’un avis totalement contraire.

Bon, les mecs c’est pas des flèches. Ils comprennent pas tout. Si je parle bizness, ça va leur connecter leurs deux neurones :

- Qu’est-ce tu fous là ? ils me disent. Tire-toi t’as rien vu !

- Eh les mecs, à trois sur une gonzesse et vous y arrivez pas, z’êtes pas fortiches ! J’ai mieux pour vous. 

- Eh l’avorton, tire toi on t’a dit !

- La fille contre L’herbe des nuits (je le dis sans modestie, mais mon herbe, elle est connue et réputée).

- Hein, qu’est-ce-que tu dis ?

- Je te propose de l’herbe et tu me laisses la fille, je dis à leur chef. Il dit plus rien. Un silence froid, total. « Un cirque passe » dit l’un des autres mecs. On dit : « Un ange passe, connard », lui dit son chef, ce qui me fait penser que les deux neurones, ils sont sûrement à  lui.

Bon, je vous passe les longues minutes de sa réflexion. Il accepte. Je leur file de l’herbe, et moi je repars avec Madeleine. Sauvée. On décarre vite fait tous les deux, histoire que les mecs y changent pas d’avis, même si après avoir fumé mon herbe, ils auront plus la tête à ça. Mon herbe elle rend sympa. Bon avec Madeleine on s’grouille quand même. Et là, en tournant la tête, je vois une tâche rouge sur un mur, vaguement éclairée par un vieux réverbère. J’m’arrête et je cueille les deux Fleurs de ruine, c’est comme ça que Madeleine les appelle  et je lui offre. Elle sourit et son visage s’approche du mien. Après ce baiser, elle me dit des trucs à l’oreille, mais je les garde pour moi, c’est mon jardin secret. Vous m’en voulez pas ? J’espère, sinon, tant pis pour vous. En plus, je vais être obligé d’abréger, parce que faut pas déconner, demain, y’a cours !

 

Commenter cet article
Z
Marcel, sors de ce corps !!!!
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Y
<br /> <br /> Ah non, reste... enfin, en tout bien tout honneur il va sans dire<br /> <br /> <br /> <br />
Z
et, en plus, elle s'appelle Madeleine !! la prochaine fois tu nous fais l'histoire avec Proust ????<br /> Bravo, quelle imagination et quel texte !!!
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Y
<br /> <br /> En fait c'est le premier prénom qui me soit venu à l'esprit. Marcel sommeille en moi....<br /> <br /> <br /> <br />
F
Je n'étais pas fortiche tout à l'heure -voir commentaire ci-dessous- mais là j'me bidonne sacrément, j'adore ton texte! Tu le proposes à Grand Corps Malade, il te le slam en moins de deux.<br /> Bravo chevalier valeureux!
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Y
<br /> <br /> Il vient à Nantes prochainement, je lui ferai passer...<br /> <br /> <br /> <br />
C
Mais non tu t'as pas démérité !
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Y
<br /> <br /> Ah merci...<br /> <br /> <br /> <br />
K
Bravo, j'aime beaucoup ce que tu as fait de ces titres de Modiano... Ton histoire devient poétique, du coup.
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Y
<br /> <br /> Merci.<br /> <br /> <br /> <br />