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Le fossé

Publié le par Yv

Le fossé, Hervé Jaouen, Presses de la cité, 2012

Longue lettre d'un père à sa fille dans laquelle il explique son geste, celui qui l'a amené en prison. Douze ans auparavant, Catherine, la fille de Xavier disparaît une nuit. Xavier part à sa recherche et découvre dans sa ville des quartiers qu'il n'avait jamais vus. Lui, le notable, vétérinaire, belle situation, marié, vit dans les beaux-quartiers. Catherine, 13 ans a des amis des quartiers de la zone et y disparaît. Xavier va tout faire pour la sortir de là jusqu'à commettre l'irréparable.

Hervé Jaouen dans un style direct et franc hisse son livre dans le haut du panier. Ecriture rapide et texte court (157 pages aérées) il se lit d'une traite sans pouvoir s'arrêter. On est à la fois dans un roman noir efficace, celui de la volonté farouche d'un homme de sauver sa fille quitte à y laisser sa réputation, sa situation, tout ce qu'il a construit petit à petit et dans une lettre poignante d'un père à sa fille lui expliquant tout l'amour qu'il lui porte et combien les non-dits entre eux (souvent de sa faute à lui) ont pu leur faire du mal. Cette lettre débute ainsi :

"Ma Chère Catherine,

Le directeur vient de me l'annoncer : je serai libéré dans quinze jours. Il faut croire que par le jeu des remises de peine légales nous sommes arrivés à l'échéance. Condamné à dix-huit années de prison, je vais être libre au bout de douze ans et cinq mois.

J'ignore s'il s'agit d'un pur hasard, ou d'une espèce de grâce, ou bien d'un arrangement négocié entre l'administration pénitentiaire et le garde des Sceaux en faveur du détenu modèle que j'aurai été. Toujours est-il que ma libération va coïncider avec ton vingt-cinquième anniversaire et ton mariage." (p.7)

Très habile, Hervé Jaouen fait monter le suspense et la tension et même si l'on sait que Xavier a tué pour sauver sa fille, on ne sait pas qui ni dans quelles circonstances, ni ce qui est réellement arrivé à Catherine. Tout se dévoile dans les ultimes pages.

J'ai découvert (un peu tard, je le concède) cet auteur avec l'excellentissime Ceux de Menglazeg et je retrouve ici, tout le brio de l'écrivain pour décrire ses personnages peu ragoûtants : "Une énorme femme barrait -occupait, remplissait ?- le couloir. Ridicule coquette aux cheveux crêpés roses, aux yeux bovins sous des faux cils argentés, aux chevilles en baguettes de tambour mais assez solides, cependant, pour supporter un quintal de chair, de graisse et d'eau. Ses seins étaient si imposants que sa robe sans manches se soulevait sur le devant, jusqu'à mi-cuisse." (p.52).

Sous prétexte de roman noir, H. Jaouen oppose deux mondes : celui de la bourgeoisie florissante et celui de la zone, des petits trafics et des crimes en tous genres. Deux mondes qui cohabitent ("le cri du crapaud en rut" selon Pierre Desproges) sans jamais se mêler. Sauf là ! Pour le pire !

Si vous ne connaissez pas encore Hervé Jaouen, voici une belle occasion de le découvrir dans cette collection sobrement intitulée Les petits romans noirs. Si vous le connaissez déjà, vous savez donc que c'est très bien. En plus, 9€ le livre, c'est abordable !

Et pour vraiment conclure, une dernière citation que j'aime particulièrement qui pourrait m'aller parfaitement, comme à nombre d'entre nous sans doute (c'est tellement bien dit que je ne peux résister au plaisir du partage) : "Je brode, Catherine. Je suis un secondaire. Mes dialogues qui auraient dû être sont toujours plus beaux que ceux qui ont été." (p.91)

Oncle Paul a consacré des billets à Hervé Jaouen, Claude le Nocher à ce livre.

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C
Salut Yv...<br /> Hervé Jaouen est un grand auteur, on ne le répètera jamais assez !<br /> Amitiés.
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Y
<br /> <br /> Exact et Flora des Embruns que je viens de finir (billet très bientôt) ne déroge absolument pas à cet avis très largement partagé<br /> <br /> <br /> <br />