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Corruption ordinaire

Publié le par Yv

Corruption ordinaire, Christophe Gavat, sang neuf, 2018....,

Sainte-Jeanne, commune de dix mille habitants, Pays basque, l'endettement le plus fort de France. A sa tête, Robert Delacour, amateur d'art qui a confondu sa maison et son bureau de maire avec l'hypothétique musée de la ville, l'arlésienne de la commune. 

C'est sur dénonciation d'un élu que les policiers, menés par le commissaire Stanislas Midlak vont enquêter sur les pratiques du maire et de son équipe. C'est par sérendipité qu'ils vont mettre à jour une corruption et des pratiques inégalées, de celles qui font inévitablement penser au "tous pourris".

Dans le même temps,  Stanislas et ses hommes sont confrontés à une bande de cambrioleurs de distributeurs de billets, organisée, efficace et difficile à cerner.

Christophe Gavat est commissaire de police. Il fut mis en examen dans "l'affaire Neyret", puis relaxé. Son premier livre fit l'objet d'une adaptation cinématographique par Olivier Marchal sous le titre Borderline (excellent, je l'ai vu).

Roman policier réaliste qui relate parfaitement le travail de fourmi des enquêteurs surtout lorsqu'ils vont dans le monde impitoyable, tortueux et abstrus des affaires politico-financières. Dès qu'ils ont trouvé un fil, ils le tirent, et les découvertes toutes plus époustouflantes les unes que les autres se font jour. Si ce n'est parfois un petit souci avec l'unité de temps -des allers-retours, le maire que je croyais en prison qui revient- vite dépassé, je dois dire que je n'ai pas pu quitter le bouquin. Je n'ai pas été au point des flics de Christophe Gavat qui laissent leur vie de famille de côté, mais à certains moments, j'aurais pu rester dans mon canapé à lire plutôt que de préparer le repas ou aller à une réunion de boulot. Mais je suis un garçon raisonnable, ce ne furent que des velléités.  

Tout cela pour dire que, aussi incroyable que cette affaire puisse paraître, elle aurait très bien pu faire la une des journaux actuels et les choux gras des médias. "En enquêtant sur ce dossier, les policiers ont pris conscience que, aussi rigoureuse et précise soit leur enquête, elle ne sera jamais que le reflet de dix pour cent de la réalité corruptive, prégnante à Sainte-Jeanne. Ils ne pensaient pas que cette affaire les amènerait à tirer cette conclusion désespérante : tel un cancer incurable, la corruption se propage de la tête à la base." (p.249)

Christophe Gavat sait de quoi il parle et mène son récit sans temps mort. Il est passionnant, par son enquête, mais aussi par les hommes -et femmes- qui l'incarnent. Stanislas Midlak en tête qui sent que son couple ne tiendra pas le choc mais qui se cache la vérité, et les autres plus ou moins célibataires, dragueurs, pour qui la vie professionnelle passe avant tout. Ecrit par un flic dont le point de vue est partial voire contestable ne représentant que des flics intègres et des politiques pourris, il peut même frôler la caricature, mais sans doute y a-t-il plus de politiques que de flics poursuivis pour divers délits et les sommes, les objectifs et les conséquences ne sont-ils pas les mêmes ? Le politique à l'image de Robert Delacour, agit pour son propre compte, pour son profit personnel pas encore, pour détourner un titre de Pierre Combescot, "Pour [son] plaisir et [sa] délectation charnelle", mais d'autres réels et connus l'ont fait. Il agit pour le pouvoir et pour jouir de sa position de force, et toujours au détriment des citoyens que nous sommes, car au bout du compte, c'est nous qui rembourserons. Sainte-Jeanne est la commune la plus endettée de France, je n'ai pu, tout au long de ma lecture me défaire de l'image du maire de Levallois-Perret et de son épouse mis en examen plusieurs fois et qui continuent à gérer la ville, un modèle pour Robert Delacour à n'en pas douter.

Le label Sang neuf -dirigé par Marc Fernandez- chez Plon s'enrichit d'un titre fort qui bénéficie en plus d'une couleur de couverture inédite et du plus bel effet, entre le vert et le bleu, turquoise peut-être ?

Commenter cet article
A
Une lecture passionnante.
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Y
Exact
Z
Une nouvelle fois, je suis très très tentée
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Y
Cool
M
Et donc ce roman n’est pas de la pure fiction ! Là, l’inspiration n’est pas puisée entre deux rangées de dents, mais bien dans l’infinie noirceur de l’Homme.
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Y
Disons que c'est de la fiction basée sur des faits presque réels au moins crédibles