Les enfants du dernier salut
Les enfants du dernier salut, Colette Brull-Ulmann avec Jean-Christophe Portes, City éditions, 2017....
"En 1942, Colette a 22 ans et elle est étudiante en médecine à l'hôpital Rothschild de Paris. En fait d'hôpital, c'est plutôt l'antichambre de l'enfer puisque les Juifs qui passent par cet établissement sont ensuite envoyés dans les camps de la mort. Face à l'atrocité de la situation, Colette intègre un réseau d'évasion qui permet aux enfants de l'hôpital d'échapper à la déportation. Car, si personne ne sait vraiment ce qui les attend, on connaît l'horreur du transport, entassés pendant des jours dans des wagons sans eau et sans vivres. Pour sauver ces enfants, le réseau truque les registres ou déclare décédés des nourrissons que l'on fait sortir en passant par la morgue... Malgré les soupçons des Nazis et plusieurs arrestations, des centaines d'enfants sont ainsi sauvés. Dernier membre vivant de ce réseau, Colette témoigne dans ce document bouleversant et essentiel." (4ème de couverture)
Ce témoignage recueilli par Jean-Christophe Portes connu pour ses polars historiques (Victor Dauterive mène l'enquête pendant la Révolution), est effectivement bouleversant. Colette, aujourd'hui presque centenaire y raconte son parcours jusqu'à la guerre qu'elle subit en tant que juive et celui de sa famille. C'est terrible à lire, parce que bien que les gens de ma génération connaissent les faits, par leurs parents, ce qu'ils ont appris à l'école, les témoignages de beaucoup de survivants pendant nos jeunes années, j'avoue que le quotidien d'une famille juive pendant la guerre, privée de tout que raconte Colette est marquant et fait frémir. Et c'est dans les détails parfois que l'on mesure la volonté d'éliminer les juifs de la société, de les mettre au ban, de les humilier : "Interdiction de posséder un poste de radio ou une bicyclette. [...] Couvre-feu obligatoire de huit heures du soir à six heures du matin.[...] Un jour de juillet, j'apprends, indignée, que nous n'avons plus droit aux mêmes horaires que les autres pour faire nos achats. les courses, ce sera uniquement entre quinze et seize heures." (p.111/112), sachant qu'il n'y plus rien en magasin dès midi !
Colette parle des actes héroïques de certains dont Claire Heymann, l'assistante sociale de l'hôpital et responsable du réseau d'évasion des enfants, de la peur et de la bassesse d'autres voire pire pour certains qui envoient sciemment des enfants en déportation.
Voici un livre primordial, un témoignage à lire et faire lire à tous, une preuve supplémentaire que l'extermination des juifs fut une entreprise à grande échelle à laquelle l'administration française prit part. Le temps avance et les témoins directs sont de plus en plus rares, leurs témoignages seront donc de plus en plus précieux à garder et diffuser avant que les révisionnistes et négationnistes déjà actifs ne profitent de cette rareté pour tenter de répandre leurs théories nauséabondes encore plus largement.