Dedans, Dehors
Dedans, Dehors, Sophie Bessis, Ed. Elyzad, 2010
"Dans ce récit intime, Sophie Bessis livre sa Tunisie, toujours sienne malgré l'exil, et quelques souvenirs chers à son coeur : les années 70, les compagnons de route, leurs engagements communs, les chemins qui parfois se séparent... En elle, "juivarabe", combats politiques et attachement à la terre natale se joignent pour former son identité profonde, inaltérable, ferment de ses travaux." (4ème de couverture)
Avant de commencer ma lecture, j'ai été prévenu par Elisabeth Daldoul, de la maison Elyzad : "c'est un texte complexe quand on ne connait pas la Tunisie de l'intérieur, il faut quelques clés pour décoder bien des choses.". Merci pour ce précieux conseil, très utile, mais malgré cela, au fil des pages, je me disais que certes, je ne comprenais pas tout, mais que l'écriture de Sophie Bessis m’entraînait là où peut-être elle n’entraînerait pas ceux qui connaissent la Tunisie. C'est le récit très intime d'une femme ancrée dans son pays de vie, "le pays aux ciels gris" qui parle de son pays d'origine auquel elle est viscéralement attachée, la Tunisie, "le petit pays aux matins clairs et aux murs blancs". Très elliptiquement, Sophie Bessis raconte sa vie, ses combats, ses travaux, ses rencontres, ses amis en Tunisie. Le fait que ce récit soit très elliptique lui donne deux niveaux de lecture :
- ceux qui savent l'histoire du pays, ses hauts personnages et ses habitants peuvent retrouver tout ce à quoi l'auteure fait allusion sans jamais vraiment le nommer. Ils retrouveront les noms, les lieux qui leur permettront de s'ancrer dans une réalité.
- ceux qui, comme moi, ne connaissent du pays que les images touristiques et quelques notions historiques un peu lointaines se laisseront porter par l'écriture, par les images qu'elle fait naître. J'ai deviné les combats de l'auteure, ses souffrances de voir que certains dans son pays d'origine pouvaient lorgner vers des idées radicales alors que la majorité des autres habitants vivent ensemble, même si une certaine incompréhension entre les communautés juive et arabe peut exister. Néanmoins, la mixité est tangible : les mariages mixtes, les femmes qui peuvent choisir leurs maris par amour et dans une communauté différente de la leur, on est loin là des mariages arrangés. Elle dit sa difficulté de voir que certains de ses anciens camarades de lutte sont désormais des "Importants" du régime qui ne veulent plus -et ne peuvent plus- résister à la montée de l'intolérance. J'ai vu aussi le désir qu'elle a de faire parler les femmes tunisiennes et plus largement les femmes du Maghreb (elle a écrit, en collaboration avec "Sol" une femme arabe, un livre : Femmes du Maghreb, l'enjeu, en 1992 puis un autre Les Arabes, les femmes et la liberté, en 2007).
Une fois n'est pas coutume, avant de commencer cette lecture, je conseille de lire d'abord la 4ème de couverture ainsi que la liste des ouvrages écrits pas Sophie Bessis qui donnent des pistes de compréhension plus grande de ce très beau récit.