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Nature morte aux papillons

Publié le par Yv

Nature morte aux papillons, Lorenzo Cecchi, Éd. Le castor astral, 2012

Vincent est un jeune homme qui vit à Bruxelles, dans les années 70. Étudiant, il se retrouve coincé entre une famille qui lui demande de l'attention, son père étant au plus mal, et Carine sa fiancée qui l'envahit, le protège alors qu'il ne rêve que de liberté. Trop couard ou par peur de faire du mal à ses proches, il ne prend aucune décision, ne rompt pas avec Carine pour qui pourtant il n'a qu'affection, quand elle envisage le mariage. Il passe du temps avec Nedad, un artiste yougoslave à jouer aux échecs. Un jour, Suzanne entre dans sa vie. Suzanne et sa notion toute particulière de l'amour.

Voici un roman que j'ai choisi dans la liste de Dialogues Croisés au hasard, sur le thème et parce que j'aime bien faire des découvertes, et aussi parce que j'ai déjà lu un ou deux livres de cet éditeur et que j'aime bien son nom, Le Castor Astral. Que des arguments objectifs ! Je reçois à la maison (Merci Caroline) les épreuves non corrigées, et en les ouvrant, quelle ne fut pas ma surprise de voir que "Cet ouvrage de la collection "Escales des lettres" est publié sous la direction de Francis Dannemark" (p.2). Et oui, le Francis Dannemark dont j'ai adoré le dernier roman : La véritable vie amoureuse des mes amies en ce moment précis. Nous étions donc fait pour nous rencontrer. Je me suis dit que s'il dirigeait cette collection, ce livre de Lorenzo Cecchi devait être bien. Je partais donc avec un a priori positif. A priori confirmé par la lecture. Mais on est loin du roman de F. Dannemark : aucune ressemblance.

C'est un roman qui parle de la difficulté de s'engager, de trouver la bonne personne avec qui construire sa vie. Celui d'une génération sans doute déboussolée par mai 68 et la révolution sexuelle des années qui suivirent (je dis, ça parce que je l'ai lu, moi, j'étais trop petit, né en 1966 !). Ce qui est intéressant c'est que l'auteur fait de ses héros masculins des êtres faibles, en plein questionnements, pas franchement matures ni prêts à affronter la vie (mesdames, ça doit vous faire sourire qu'un homme ne réalise cet état de fait que maintenant, ce qui abonde dans le sens de l'immaturité dont je parle plus haut). C'est la femme qu'elle soit Carine, celle qui protège, celle qui materne ou qu'elle soit Suzanne, celle sur laquelle Vincent fantasme, la femme fatale, sexuée, qui est libre et qui décide de sa vie.

Vincent s'interroge tout au long du livre (ça peut parfois être un tout petit peu long sur la première partie, ça ne l'est pas sur la seconde). Ses hésitations sont argumentées, il ne prendra aucun risque : trop cérébral, le jeune homme ! Trop renfermé ; parfois, comme dans l'extrait qui suit, je me suis revu à 18/20 ans (maintenant, ça va mieux -quoique...- l'âge venant la personnalité s'affirme, mais dans une foule, je fais souvent -volontairement- "tapisserie" : 

"La foule -quelques personnes- agit sur moi comme un astringent ; je me recroqueville, m'auto-avale, me fais le plus petit possible jusqu'à ce que ma présence sorte du monde sensible. Faire partie d'un groupe, quel qu'il soit, me met mal à l'aise : je ne sais vraiment pas comment me comporter pour être "dans la ligne du parti"." (p.34/35)

Je le disais un peu plus haut, là où la première partie souffre de quelques longueurs, la seconde en est exempte. Celle-ci se déroule une petite dizaine d'années plus tard, à la trentaine. Vincent apparaît toujours désabusé : il revoit, après une longue absence, Nedad et Suzanne. Mais je ne vous en dirai pas plus, je laisse le suspense s'immiscer en vous.

Parlons de l'écriture de Lorenzo Cecchi, qui écrit en français, ce n'est pas un roman traduit. Il sait écrire de belles phrases, avec parfois des mots savants dont on devine le sens si on ne les connaît point. Il sait aussi parfois y glisser des expressions ou des vocables familiers voire grossiers qui donne à son style un côté oral, courant. J'aime beaucoup cette alternance de belles phrases et de tournures familières, ça me fait penser à du Desproges, l'humour en moins. Plus exactement, pas le même humour. Celui de L. Cecchi est celui du désespoir, sarcastique et ironique, un rien désabusé (j'aurais pu dire cela de Desproges aussi, remarquez bien), mais là où l'un est fait pour faire rire de manière efficace, l'autre est plus saupoudré, plus léger.

Pour finir par une boucle bouclée, je confirme que ma découverte (dont je parle au début de ce billet) de cet auteur par Dialogues croisés est un essai largement transformé.

 

 

dialogues croiséschallenge 1%

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A
Une boucle bouclée, alors c'est sans fin...
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Y
<br /> <br /> Je le crains<br /> <br /> <br /> <br />