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Les communiants de Rouen

Publié le par Yv

Les communiants de Rouen, Gilles Delabie, Ravet-Anceau, 2012

Rouen, dans l'après-guerre, la ville est en chantiers. Dans l'un d'eux, proche de la crypte de la cathédrale, sont retrouvés huit corps d'enfants. L'évêque de Rouen fait alors murer cette crypte pour que l'affaire ne s'ébruite pas. Mais c'est sans compter sur le commissaire Kléber Bouvier qui a vu les corps et qui est persuadé qu'il s'agit d'enfants tués pendant la guerre, une dizaine d'années plus tôt.

Excellent petit polar de 158 pages ! Idéal pour glisser dans un sac ou dans une poche (comme les autres livres de cet éditeur dont je vous recommande le catalogue). La construction de ce polar peut ressembler parfois à des polars nordiques : les petites victimes s'expriment en tête des chapitres et l'enquête avance doucement mais sûrement. Les personnages sont bien campés. Ni tout blancs ni tout noirs, tous ont leurs zones d'ombre, leurs petits secrets qu'ils ne veulent pas voir dévoiler au grand jour, tant Kléber Bouvier que son principal protagoniste, Monseigneur Glâtre, l'évêque de Rouen. Bouvier est plutôt calme, la cinquantaine juste dépassée, mais il peut parfois s'emporter violemment dans un langage très imagé : "A la patrie reconnaissante ! reprit-il en ricanant. Bah merde alors ! Un pays où on montre son poitrail pour y prendre du plomb et son fion pour y fourrer la pommade... Merci bien. Et tout ça en musique... Sonnez clairon, descendez braguette... Avec les honneurs et la poignée de main du ministre... Et quel ministre ! Legendre, cette France-là, je vous la laisse... Je n'ai plus rien à y foutre... Je suis ancien combattant, militant socialiste et rentier... Pour ainsi dire intouchable... Je vais m'en aller et vous viendrez me décorer pour mes bons et loyaux services devant tous les petits copains... On se fera une belle accolade et j'écouterai poliment votre discours... N'est-ce pas, Legendre ? Vous comprenez à présent ? Je suis libre." (p.51/52)

L'intrigue tient la route, l'époque de l'après-guerre permet de jouer sur l'opposition collaborateur/résistant, mais là encore tout n'est pas si simple qu'il y paraît. Pas de manichéisme chez Gilles Delabie, et c'est très bien ainsi, l'inverse eût été trop "facile", trop évident. Enquête linéaire mais qui réserve quelques rebondissements lorsqu'on croit que tout est calé, fini.

Le contexte est intéressant : je ne connais de Rouen que les boulevards extérieurs qui permettent d'éviter son centre (sauf l'an dernier ou par la faute -ou grâce- à un maniement de GPS de débutant je me suis retrouvé en plein centre de la ville alors que je voulais la contourner). Ville détruite pendant la guerre, elle est, dans ce roman, en pleine reconstruction, en rénovation nécessaire, notamment pour ses quartiers insalubres : "Le meublé donnait sur le rez-de-chaussée d'une rue crasseuse où nombre de rats avaient élu domicile. En plus des gaspards, d'autres vermines s'étaient établies dans le quartier. Des julots et leurs marmites hantaient les bistrots. Certaines arpentaient le pavé, d'autres se plantaient dans de sombres couloirs qui sentaient la pisse. Toute cette faune grouillait entre les murs d'immeubles délabrés" (p.78)

En bon anticlérical que je suis, j'ai ouvert ce polar avec un a priori positif (Les communiants de Rouen, ça devait forcément taper sur l'Institution religieuse) et l'ai refermé avec beaucoup de plaisir -non pas celui de l'avoir enfin fini, mais au contraire celui d'avoir lu un très bon roman policier. Et comme je le disais plus haut, point de manichéisme chez l'auteur, mon anticléricalisme dût-il en prendre un coup, Gilles Delabie sait  jouer avec les stéréotypes pour mieux les dynamiter.

 

région thrillers

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D
Bonsoir Yv, ton billet me donne envie de retourner à Rouen que j'ai découverte grâce à une visite chez Aifelle. Bonne après-midi.
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Y
<br /> <br /> Flaner à Rouen avec ce bouquin entre les mains, pourquoi pas ?<br /> <br /> <br /> <br />
G
Rhoo, ben on ne peut que noter un tel titre quand on aime les polars et qu'on évite les pavés. Curieux, je pensais que cet éditeur publiait uniquement des livres de la région Nord pas de Calais...
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Y
<br /> <br /> C'est une grande partie du catalogue, mais comme les gens du nord sont très ouverts, ils élargissent uax autres régions. Ceci étant, la Normandie, ça reste au nord ;)<br /> <br /> <br /> <br />
A
Cà se passe chez moi et je ne le sais pas ! Hop, noté et pratiquement dans mon panier.
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Y
<br /> <br /> Eh bien alors, on ne se tient pas au courant de la littérature régionale proche ???? ;)<br /> <br /> <br /> <br />
A
Vive les a-priori et les GPS.
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Y
<br /> <br /> A qui le dis-tu !<br /> <br /> <br /> <br />
L
eh eh, un bon petit polar !<br /> d'une région peu connue de moi (et qui pourrait rentrer dans mon challenge !)
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Y
<br /> <br /> Et oui, et en plus chez Ravet-Anceau, tes partenaires !!!<br /> <br /> <br /> <br />