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Churchill à Yalta. La Pologne trahie

Publié le par Yv

Churchill à Yalta. La Pologne trahie, Michael Dobbs, Ed. ZdL, 2011

Yalta, Crimée, le 03 février 1945, commence la fameuse conférence pendant laquelle Franklin Roosevelt, Joseph Staline et Winston Churchill vont régler le sort du monde qui s'apprête à fêter la défaite du nazisme. Michael Dobbs s'attache à Churchill qui tente de s'opposer à Staline pour tenter de sauver la Pologne, et par conséquence, le reste de l'Europe.

L'éditrice, Zofia de Lannurien (d'où les éditions ZdL) parle d'un "roman de fiction documentarisé", c'est à dire que sur la base de documents officiels, avec des personnes réelles, l'auteur bâtit un livre dans lequel, il extrapole et dans lequel il ajoute des personnages fictifs, tel le plombier polonais Marian Nowak. Dans le même genre, j'ai lu récemment L'homme qui aimait les chiens de Léonardo Padura (dès que je peux je le replace, tellement ce roman est formidable).

Avant même de débuter, la conférence de Yalta part sur de mauvaises bases : Staline refuse de sortir de Russie et oblige Churchill et surtout Roosevelt, très malade et en fauteuil (il mourra en avril 1945) à parcourir de nombreux kilomètres. Sur place, les palais des délégations anglaise et étasunienne sont sur écoute, et Staline mène le bal face à un Roosevelt affaibli qui ne rêve qu'à une seule chose : créer l'ONU avec l'appui du dirigeant russe. Pour cela, il accédera à beaucoup de ses requêtes, Churchill se battant seul pour contrer Staline. Celui-ci est d'ailleurs très habile et sait jouer de la faiblesse du président. De plus, ses troupes étant aux portes de Berlin, il est là, en position de force.

Dans le même temps, un plombier polonais, Marian Nowak, par l'intermédiaire du valet de Churchill prend contact avec celui-ci. Ce plombier est fictif, et par lui, l'auteur nous dit toutes les horreurs qu'ont vécu les Polonais. Écrasés, tués, mis véritablement en esclavage par les nazis, les femmes et jeunes filles seront violées, les hommes torturés. Ils seront libérés par l'armée russe qui leur prodiguera les mêmes atrocités, voire pire ! Pendant ce temps, à Yalta, Staline justifie l'avancée de ses troupes et les crimes qu'elles perpétuent. Les pages 200 à 202 racontent comment un homme voit sa femme et sa fille de 16 ans se faire violer, comment tentant de se rebeller, on le sort et on lui tire dessus, et lui, hurle "cassé en deux, tenant à pleines mains la plaie béante où, quelques instants auparavant, se trouvait encore ce qui faisait de lui un homme." ; et pendant qu'il crie, à l'intérieur de sa maison, les soldats russes violent également sa petite fille de 10 ans !

Chaque chapitre de ce roman concerne une journée de la conférence qui en a eu huit. En parallèle, on assiste aux débats, aux joutes verbales avec de belles réparties :

"Staline, pourtant n'en avait pas fini avec Churchill :

- Des rumeurs courent en Suisse, monsieur Churchill, sur un éventuel accord que vous souhaiteriez passer avec l'Allemagne. Une paix séparée, quand ils seront débarrassés de Hitler.

- Je dois vous dire, maréchal Staline, que ce n'est pas dans mes habitudes de passer des accords avec Hitler. Mais, si je devais l'envisager, soyez assuré que je viendrai (sic) vous consulter en priorité, afin de bénéficier de votre expérience considérable en la matière." (p.282)

Ce bouquin passionnant se finit (juste avant l'épilogue et la postface) par ces phrases terribles qui résument la situation :

"Nowak. Okulicki. [noms de deux Résistants polonais] Ainsi que des dizaines de milliers d'autres. De façon systématique, les Russes achevaient la tâche commencée par les nazis et balayaient toute trace de résistance polonaise." (p.320)

J'aimerais tant vous faire passer tout ce que j'ai ressenti en lisant ce roman : il est pour moi aussi fort que celui de L. Padura dont j'ai parlé plus haut et c'est un compliment, puisqu'il fait partie de ce que j'ai lu de mieux dernièrement ! Et pour finir, je ne peux que vous inciter, d'abord à lire ce livre (vous ne le regretterez pas) et ensuite à ne pas sauter la préface -ni la postface et les remerciements- dans laquelle M. Dobbs explique son travail de romancier par rapport à celui d'un historien. Il n'amoindrit pas leurs travaux mais explique qu'un roman "documentarisé" peut expliquer plus de choses et est surtout à la portée du plus grand nombre. L'historien s'attache aux faits, et le romancier plutôt aux personnes et à leurs vies qui parfois expliquent leurs actes. Ça me va ! Personnellement, je préfère un bon roman, bien construit, bien documenté à un ouvrage plus austère bien que sûrement plus précis et plus fin.

Merci à Gilles Paris.

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N
<br /> Si ce livre est un roman documentarisé, cela donne quand même une bonne idée de ce qui s'est réellement passé à Yalta, on dirait ... C'est tout l'intérêt de ce genre d'ouvrage que de pouvoir<br /> vulgariser des moments historiques parfois difficiles à lire ! Dans tous les cas, je retiens la référence.<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Je préfère un bon roman documentarisé à un essai, c'est souvent plus facile à lire<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Je ne lis pas ta note de lecture parce que je l'ai reçu aussi (en ce moment, j'ai un peu traîné dans mes lectures-partenariats...).<br /> Bon weekend !<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> A plus tard alors...<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> Churchill peut-être mais comment puis-je te dire ? J'ai baigné, dans mon enfance, sur les raisons, les actions et les manœuvres politiciennes de cette époque. Ce n'est pas assez vieux pour être de<br /> l'Histoire, pour moi!<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Désolé, pour moi, c'est une période que je n'ai pas connue et je ne suis pas au fait des manoeuvres politiques. Mais bon, rattrape toi sur le Padura !<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> Churchill à Yalta : Bof par contre j'ai noté celui de Leonardo Padura, ton enthousiasme et tes répétitions ont vaincu mes réticences.<br /> <br /> Le Papou<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Le Padura est inévitable. Churchill est pas mal aussi pourtant<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> C'est du sérieux et du lourd, comme lecture.<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Oui, mais accessible néanmoins.<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Ca m'a l'air très bien, je note ! J'ai lu "Yalta" d'Arthur Conte l'année dernière, qui ne m'a pas laissé un bon souvenir.<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Celui-ci décortique bien tous les petits compromis, les arrangements entre amis au mépris des peuples pour tenter de sauver une certaine vusion du monde. Glaçant et instructif !<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> Je ne connais pas du tout, mais tu m'as donné envie d'en savoir plus...<br /> Merci d'être passé :)<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Je découvrais moi aussi avec bonheur.<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> Tout à fait d'accord avec toi pour les romans historiques moins indigestes que certains manuels détaillés ! Cela dit, j'aime l'histoire (en général, pas maladivement !!^^)grâce à ce type de livres.<br /> Je le note, merci de ton enthousiasme qui alourdit ma LAL... ;)<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> Désolé pour la LAL. Je tâcherai de ne pas aimer les prochains...<br /> <br /> <br /> <br />