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Le papier peint jaune

Publié le par Yv

Le papier peint jaune, Charlotte Perkins Gilman, Tendance négative, 2020 (traduit par Marine Boutroue et Florian Targa)

Une jeune femme en dépression post-partum est emmenée par son mari médecin, pendant trois mois, dans une maison isolée. Dans cette maison, il lui destine une chambre tout en haut, peu accueillante, barreaux aux fenêtres, plâtre qui tombe et papier peint d'un jaune douteux en partie arraché. C'est là qu'elle va passer ses journées et ses nuits et bientôt les motifs et la couleur du papier lui donnent des hallucinations, font apparaître d'étranges formes.

Écrit en 1892, ce court roman bénéficie d'une nouvelle traduction pour les éditions Tendance Négative. Je dois bien dire que ce qui m'a, de prime abord, attiré c'est l'écrin du texte. Un livre très beau que je n'ai pu qu'à peine feuilleter car il faut en couper les pages. Le texte est au début sur des pages blanches, puis de plus en plus sur des pages illustrées, un papier peint. La mise en page est elle-même très originale : parfois des pages pleines, d'autres très aérées parfois vides... C'est vraiment un bel objet et si vous allez sur le site de l'éditeur (Tendance Négative), vous pourrez voir que tous leurs ouvrages bénéficient d'un traitement particulier et original.

Le texte de Charlotte Perkins Gilman (1860-1935) flirte vers le fantastique tendance Edgar Allan Poe, et parle d'une femme séquestrée par un mari médecin qui ne comprend rien à son état de jeune maman et qui, comme beaucoup à l'époque, savait qu'il suffisait de beaucoup de repos, d'abandon de rêves d'écriture et de recentrage sur les tâches féminines -entendre tâches ménagères et de maman- pour que tout aille mieux. L'autrice a vécu la dépression post-partum et l'incompréhension et a suivi les conseils d'un médecin avant de tout balancer et d'aller mieux. Elle fut une militante et une écrivaine féministe. Ce beau livre et cette nouvelle traduction moderne et facile à lire -ce qui n'est pas toujours le cas des textes de l'époque- lui rendent hommage et la remettent en tête de gondole dans toutes les bonnes librairies.

Un petit extrait que j'aime bien pour finir (la mise en page en moins), une description sommaire du papier peint, la première fois que la jeune femme le voit :

"Il est assez fade pour égarer l’œil qui cherche à le suivre, assez marqué pour constamment irriter et susciter l'étude, et quand on suit les courbes médiocres, incertaines sur une courte distance elles se suicident soudainement s'engouffrent dans des angles révoltants, s'autodétruisent en des contradictions inouïes. La couleur est repoussante, presque révoltante un jaune asphyxié et sale étrangement décoloré par la lente course du soleil. C'est un orange à la fois cireux et criard en certains endroits une teinte corrosive et sulfureuse en d'autres." (p.28/29)

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K
Ah très très tentant. L'extrait est alléchant, belle écriture et ce que tu en dis donne envie de plonger dans ce jaune asphyxié...
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Y
J'aime bien lorsque les textes un peu anciens sont remis en avant, ce qui est ici, très ben fait