La moisson rouge
La moisson rouge, Dashiell Hammett, Gallimard, 1932 (traduit par P.-J. Herr)
Le narrateur, détective à la Continental Detective Agency, succursale de San Fransisco, a rendez-vous avec un patron de presse de Personville, Donald Willsson. Alors qu'il l'attend chez lui, ce dernier est assassiné. Elihu Willsson, le père du jeune défunt est "le tzar de Poisonville" ainsi que la ville est surnommée, tant les gros voyous y pullulent. Le détective arrache au vieil homme dix mille dollars pour nettoyer la ville. C'est le début d'une histoire sanglante.
Écrit et paru avant Le faucon de Malte, ce roman est une sorte de western de la fin des années 20. Un détective sème la pagaille dans les rangs des voyous d'une ville gangrénée par le crime, les incite à s'entretuer tentant lui-même de passer entre les balles, ce qui n'est pas si simple.
Dur et violent, sans bon sentiment, ici rien ne se fait pour autre chose qu'un profit tangible. Dinah Brand, la seule femme du lot n'est pas la dernière à vouloir tirer son épingle du jeu, c'est sa seule façon de s'en tirer face à ces hommes sans foi ni loi. Seul le détective le fait pour autre chose : ses raisons restent floues, sans doute une certaine conscience professionnelle qui, cependant, se limite à la grande idée générale et ne s’encombre pas de scrupules quant aux moyens utilisés.
Dashiell Hammet écrit du noir désespéré, direct. Il a le sens de la formule : "Je me laissai ensuite conduire à une chambre mal tenue, où je transvasai un peu de scotch de ma gourde dans mon estomac et me couchai en prenant mon pistolet et le chèque du vieil Elihu avec moi." C'est moderne pour l'époque et il casse les codes, précurseur d'un genre nouveau : le hard-boiled, ce roman noir dans lequel les limites entre le bien et le mal sont floues et qui est basé sur la violence et l'action. Et là, tout y est.