Une verrière sous le ciel

Une verrière sous le ciel, Lenka Horňáková-Civade, Alma, 2018...,
Fin 1988, une jeune femme, Ana, dix-huit ans à peine, tchèque, sur le quai de la gare de l'est à Paris au retour d'une colonie organisée par le parti, décide de ne pas rentrer chez elle. Elle part, erre dans les rues de la capitale, se retrouve au Père Lachaise, sur la tombe d'Amedeo Modigliani. C'est là que Grofka, une femme belle et étrange lui vient en aide et lui propose d'être hébergée dans l'arrière salle d'un café tenu par Bernard. C'est donc dans ce café que Ana apprendra les coutumes et les habitudes françaises. Sur les conseils de Grofka, elle restera muette, aidera Bernard au café et rencontrera les piliers de ce petit bistrot de quartier.
Un peu long et traînant parfois, ce roman gagne cependant à être découvert et son auteure à être lue. Je l'avais déjà rencontrée dans son précédent et très bon opus Giboulées de soleil. Cette fois-ci encore elle décrit une femme, Ana qui va se découvrir et se révéler au fil des pages. De jeune femme fragile et timide, elle devient une femme avec des envies, des désirs qu'elle compte bien réaliser. Elle s'y autorisera et l'on sent bien, une fois le livre fermé qu'à l'aube de ses vingt ans, l'avenir lui appartient et qu'elle fera tout pour le façonner à ses souhaits.
Lenka Horňáková-Civade écrit de très belles pages sur la création qu'elle soit littéraire ou picturale, car l'un de ses personnages est peintre et la verrière du titre protège son atelier autant qu'elle y fait entrer la lumière. A noter que l'auteure est aussi peintre et née dans l'actuelle république Tchèque, elle parle donc ce de ce qu'elle connaît bien. J'ai bien aimé également les pages sur la manière dont l'éducation, les règles de la société dans laquelle on vit nous forge ; comment ce qui nous est inculqué nous reste à vie, mais que tout cela peut être tempéré ou accentué par les rencontres, ce que l'on apprend des autres. Elle explique bien aussi comment un symbole, une date, un rite particulier d'un pays n'est pas le même dans un autre. Elle prend l'exemple du 1er mai en France et en ex-Tchécoslovaquie où là-bas, il fallait défiler à la gloire du pays.
C'est bien vu, cela permet de changer un peu sa manière de voir les choses, et de se rappeler tout ce que peut nous apporter l'autre, surtout lorsqu'il est étranger, un formidable contre-pied au discours de peur et de haine contre les réfugiés actuels passés et futurs.