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Le vertige des falaises

Publié le par Yv

Le vertige des falaises, Gilles Paris, Plon, 2017.....

Sur une île en proie à l'exode vers le continent, vit la famille de Mortemer : Olivia et Aristide les grands-parents, Rose et Luc les parents et Marnie la fille et petite fille, sans oublier Prudence la femme à tout faire et sa fille Jane, la seule amie de Marnie. Ils vivent tous dans une maison de verre et d'acier nommée Glass. Se dégage de cette maison une atmosphère emplie de mystères et de violence sourde. Les femmes, et particulièrement Olivia paraissent régner sur la maison et l'île. Et si ce qui semble si  solide voire indestructible était plus fragile qu'il n'y paraît ? Et si une personne connaissait tous les secrets de Glass et des de Mortemer ?

J'ai découvert Gilles Paris, comme beaucoup, avec l'excellent Autobiographie d'une courgette, qui a donné naissance au désormais fameux film multi-récompensé Ma vie de Courgette. J'ai continué à le lire et sur son titre L'été des lucioles ai émis des réserves parce que je trouvais que, au début du livre au moins, le romancier se répétait. Et puis arrive Le vertige des falaises. Un peu anxieux à l'idée de retomber dans une histoire certes jolie, mais un peu "déjà-lue", j'ouvre ce roman, et là, dès les premiers mots, je sais que ça va coller : "Papa est mort. Je devrais avoir du chagrin, je n'en ai aucun. J'irais bien jouer avec Jane, mais la main baguée de grand-mère Olivia m'emprisonne. Le vent, lui, me décoiffe, et des mèches rousses me rendent aussi aveugles que Jane." (p.9) J'adore cette écriture, phrases courtes qui vont à l'essentiel, qui s'enchaînent rapidement, ne laissant au lecteur que peu de temps pour souffler entre elles. Heureusement, Gilles Paris a choisi d'écrire en très courts chapitres, de deux à trois pages. En fait, ce sont les journaux de Marnie et Olivia qui se croisent, se répondent parfois. Puis ceux d'autres personnages : Géraud le médecin de l'Île, Agatha la fleuriste, Vincy un garçon de l'Île, fils du pharmacien, et quelques autres plus brièvement.

Tout à fait le genre de livres dont on n'a pas envie de sortir, dont on ne peut pas passer un mot, au risque de rater une information importante, ou tout simplement parce qu'on en n'a pas envie, tant l'écriture est plaisante. J'avoue avoir freiné un peu ma lecture sur la fin, pour profiter des derniers instants, des dernières révélations, encore un peu, pour rester un peu plus longtemps sur l'Île. Cette Île qui est un véritable personnage, d'ailleurs elle est toujours écrite avec une majuscule -ainsi que le Continent, son opposé nettement moins présent. Le ciel est toujours bas, souvent gris, la nature est belle mais un peu austère. Gilles Paris installe un climat tendu, sombre qui, par son décor m'a fait penser à L'étourdissement de Joël Egloff et par ses personnages et l'ambiance générale à Hitchcock ou Agatha Christie entre autres.

Les personnages sont très travaillés, la forme du journal permet d'aller au plus profond de leurs sentiments, de leurs émotions. Ils se révèlent petit à petit, sans filtre et l'alternance des points de vue permet de les connaître de l'intérieur mais aussi de l'extérieur. Les de Mortemer semblent forts aux yeux des îliens, ils le sont sans doute beaucoup moins lorsqu'ils s'expriment et lorsque ceux qui les côtoient parlent d'eux. Le style résolument rapide et direct permet d'entrer rapidement dans l'intimité de chacun d'eux, de comprendre ce qui les a amenés à Glass et ce qui les y retient. J'aimerais en dire beaucoup plus sur ce roman, mais je ne veux rien dévoiler, ce serait tellement dommage de gâcher tous les rebondissements, la tension présente du début à la fin.

J'aimerais également dire tous mes remerciements à Gilles Paris qui, une fois sorti de sa zone de confort -ses très beaux romans positifs écrits du point de vue de l'enfant- sort là un véritable roman noir, sombre et dur, pas si loin de ses thèmes de prédilection, mais vu par un autre petit bout de la lorgnette, un véritable coup de cœur pour moi. Il pourra décontenancer les fidèles de l'auteur, auxquels je conseille très fortement la lecture qui devrait les scotcher tout autant que moi.

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L
J'hésitais... Eh bien voilà, je n'hésite plus !
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Y
J'ai beaucoup aimé dans un genre très différent du reste des romans de Gilles Paris
G
Jamais lu non plus, mais là tu donnes vraiment envie de réparer ça au plus vite!
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Y
Quoi ? Tu n'as pas lu Courgette ? (à dire très fort avec un air plus qu'étonné). Mais tu as raté ta vie... pour un peu que tu n'aies pas de Rolex, alors là, c'est fini... ;)
J
J'ai découvert l'écriture de l'auteur avec L'été des lucioles, c'est peut-être pour cela que je n'ai pas remarqué alors que l'auteur se répétait. Remarque que je me suis faite ici avec Le vertige des falaises que je viens de terminer. Mais ces répétitions ne m'ont pas gênées, cela semble un peu nécessaire dans un roman choral. Comme toi, je trouve ce dernier roman beaucoup plus profond avec des pesonnages bien travaillés qui nous laissent sans cesse découvrir une de leurs multiples facettes. Et effectivement, l'atmosphère de l'Île donne le vertige.
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Y
Les répétitions étaient plutôt d'un livre à l'autre, qui se ressemblaient pas mal. Là, Gilles Paris est parti sur un autre domaine, plus noir, plus sombre avec bonheur
N
Je me réjouis de lire ce nouveau roman de l'auteur !
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Y
Tu peux, très différent et très bon
K
Jamais lu l'auteur, mais je pense le rencontrer à un salon du livre!!!
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Y
Normalement, je vais le voir ce weekend au Printemps du livre de Montaigu
A
Je n'ai jamais lu l'auteur, mais là, me voilà vraiment tentée.
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Y
Un très beau roman que je te conseille fortement
A
L'auteur sort de sa zone de confort, tu as raison, mais reste tout aussi passionnant.
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Y
Exact, essai très convaincant