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Le sculpteur

Publié le par Yv

Le sculpteur, Scott McCloud, Rue de Sèvres, 2015 (traduit par Fanny Soubiran).....

David Smith est un sculpteur qui a sans doute laissé passé sa chance de devenir célèbre pour son art. Faute d'argent, il ne produit plus, il boit, vit seul. Un jour, attablé dans un restaurant, il rencontre le diable qui lui propose un marché : il pourra sculpter tout ce qu'il souhaite à mains nues, sur tout support mais seulement pendant 200 jours, après il mourra. David accepte car il ne sait pas encore que peu de temps après ce pacte il rencontrera son grand amour.

Connaissant votre sagacité, je ne doute pas que vous ayez reconnu ici le mythe de Faust, ce savant qui a vendu son âme au diable pour profiter de tous les plaisirs et accéder à des savoirs alors inconnus. Scott McCloud s'empare de ce mythe pour son roman graphique absolument formidable.

J'ai été emballé par l'histoire bien sûr, qui même lorsqu'on connaît la fin reste passionnante, d'une part parce qu'une once d'espoir réside : et si le pacte avait un vice de forme ? Et si cet homme qui a retrouvé le goût de vivre émouvait le diable au point de résilier le contrat ? Évidemment, je ne vous dirai rien, il vous faudra aller au bout des presque 500 pages pour savourer le déroulement de l'histoire et son dénouement.

Les dessins sont figuratifs, réalistes, sauf lorsque David réalise des œuvres avec son nouveau pouvoir : elles sont directement issues de son imagination, de ses souvenirs et sont entre réalité et abstraction. Trois couleurs seulement, le noir, le blanc et le bleu. En fonction de la situation telle ou telle domine. Scott McCloud joue aussi avec le nombre de cases par pages : une seule ou deux lorsqu'il a le besoin de ralentir le rythme, presqu'une trentaine et même plus, superposées lorsque le récit accélère. Exactement comme dans un roman : phrases longues pour ralentir, phrases courtes pour accélérer. Des cases saturées de phylactères lorsque David est saoulé des discours environnants, d'autres cases muettes. J'ai lu que l'auteur était un "théoricien de la bande dessinée et de la communication visuelle", c'est dire s'il en connaît les codes ; il les applique donc à son ouvrage magistralement.

A certains moments, lorsque David Smith sculpte dans l'euphorie, j'ai eu des images de Akira, le seul manga que j'aie lu, de Katsuhiro Otomo, récemment récompensé à Angoulème. Les univers sont différents, mais cette folie qui s'empare des héros est assez semblable.

L'éditeur Rue de Sèvres a fait une entrée remarquée dans le monde de la BD il y a deux ans, avec notamment Une histoire d'hommes de Zep, la très belle adaptation de Maupassant, Le Horla de Guillaume Sorel ou Le château des étoiles d'Alex Alice, pour ceux que j'ai lus. Depuis le catalogue s'est étoffé et ce roman graphique ajoute une très belle note à l'ensemble.

Pour les ceusses qui comprennent l'américain, Scott McCloud a un site (cliquez sur son nom, vous y êtes)

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N
Encore un billet qui me donne une envie irrépressible de me jeter sur ce pavé !
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Y
Tu peux, je l'ai trouvé très bon
Z
Un genre que je ne connais pas. A découvrir
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Y
Le roman graphique, en général c'est bien et parfois très bien comme avec Le Sculpteur
T
je suis en plein dans ma lecture de cet ouvrage qui réussit le pari de m'intéresser alors que je n'arrive pas à lire depuis quelques jours... j'aime beaucoup les couleurs !
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Y
Un très chouette album et tant mieux s'il donne le plaisir de relire
A
Une maison d'édition qu'il faut que je découvre.
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Y
Oui, elle fait des livres très intéressants
K
500 pages, là c'est comme ça que j'aime les BD!!! Je ne me souviens même pas comment l'histoire de Faust se termine, d'ailleurs. (non, dis rien)
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Y
Ah zut, j'aurais pu te donner plein de détails... Pour le genre, on parle désormais de roman graphique, bon, je continue à dire BD...